Le parc











Il y avait même une grotte

Sur les traces de « l'empire » Vaissier

Un article de Cécile Rubichon, publié le 18 septembre 2011 dans Nord-Eclair

À l'occasion des Journées du patrimoine, l'office de tourisme de Tourcoing proposait de redécouvrir le quartier du Blanc Seau et plus particulièrement le palais que le légendaire savonnier Victor Vaissier s'est fait construire en 1892 rue de Mouvaux. 

« Je n'avais jamais reçu autant de monde chez moi ! », s'étonne encore André Richet, alors qu'il nous raccompagne. Il aurait bien discuté encore un peu avec la quarantaine d'invités que Peter Maenhout, guide-conférencier, vient de lui amener.

Au fond de son jardin, André Richet a en effet un « trésor » : une grotte artificielle probablement dédiée à Notre-Dame de Lourdes. Elle a été bâtie pour la femme de Victor Vaissier, nous raconte l'homme, qui habite rue du peintre Grau depuis plus de 50 ans. Il nous invite à entrer dans la grotte puis à grimper pour avoir une idée de l'étendue du domaine Vaissier, qui s'étendait jusqu'à la rue de Mouvaux.

En 1892, Victor Vaissier, industriel à la tête d'une entreprise familiale de fabrication de savons et produits parfumés, fait construire un immense château d'un style exceptionnel. Son architecture est inspirée des monuments indiens du XVIe siècle, tel le Taj Mahal, nous apprend plus tard Gilles Maury. 


Auteur d'une thèse sur le château Vaissier, il donnait une conférence sur le sujet au Fresnoy, en complément de la visite du Blanc Seau proposée par Peter Maenhout. 

Du palais, démonté en 1929, six ans après la mort de Victor Vaissier, il reste une grille d'enceinte, située quai du Blanc Seau, la grotte, les pavillons du jardinier et du concierge, rue de Mouvaux. D'ailleurs, le magnifique portail de la conciergerie, en cours de rénovation, va aussi s'ouvrir à nous. Autre « bonus » de cette journée du patrimoine. La maîtresse de maison, elle aussi étonnée du succès de cette visite, nous propose même d'entrer pour observer un magnifique vitrail dans la tourelle.


Du jardin, elle nous montre les tuiles jaunes et violette qui viennent d'être restaurées, les mosaïques turquoise sur la façade... Ces couleurs nous permettent de mieux imaginer le château, dessiné par Dupire-Rozan, architecte roubaisien très en vogue à la fin du XIXe siècle. Car si le palais a été photographié des centaines de fois, sous des dizaines d'angles différents, c'était toujours en noir et blanc.

Victor Vaissier, publicitaire précurseur

Rien ne le dissimulait du regard des passants. Son dôme, réalisé par André Michelin, qui a commencé sa carrière dans la construction métallique, était même volontairement situé dans l'axe de la rue de Mouvaux pour être vu, estime Gilles Maury. Pour retrouver l'ambiance du palais, il a étudié la personnalité de Victor Vaissier, génie de la publicité, véritable précurseur. L'architecture, la localisation de son palais... Tout s'inscrit dans son entreprise de communication. Il veut créer du rêve, de l'évasion autour de ses produits, à une époque où l'on ne voyage pas.

Pour promouvoir son savon des princes du Congo, le fameux Congo, il organisera une cavalcade en 1887. Il se déguise en roi du Congo et défile à dos d'éléphant. Il est escorté d'homme vêtus et maquillés de noirs. Légendaire. Tous les jours, dans les journaux nationaux et locaux, sont publiés des poèmes publicitaires complètement déjantés...

En se baladant du Fresnoy à « l'empire » Vaissier avec Peter, on découvrira bien d'autres choses sur le Blanc Seau, « un quartier à part » , qui a son église et un cimetière. Des concessions que les habitants obtiennent des élus tourquennois à qui ils reprochent de les délaisser. En 1841, ils demanderont à être rattachés à la ville de Mouvaux, qui refuse parce qu'ils ne payent pas assez d'impôts. Ils voudront ensuite l'indépendance puis devenir Roubaisiens. Ce qui leur vaudra d'être taxés de « veaux mous » par les élus. Une anecdote dont il reste une trace au niveau du pont, rue de Mouvaux, écrite « rue de Mouveaux »...